Tabitha’s Place, le château où les enfants ne sont pas rois

Alexandre Duyck

C’est dans un manoir, au cœur d’un tout petit village du Sud-Ouest, qu’a élu domicile Tabitha’s Place, ce mouvement religieux américain qui, de plaintes en perquisitions, défraie la chronique locale depuis une vingtaine d’années. Car chez ces fous de dieu, l’amour de son prochain ne semble pas s’appliquer aux plus jeunes, qui seraient soumis à des punitions corporelles, déscolarisés, privés de jouets et de médicaments. Surveillé de près par les autorités, le mouvement, jamais vraiment inquiété, s’agrandit pourtant. Notre reporter est allé frapper à sa porte.


Magazine : Marie-Claire

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Parution : 2020
Photos : Guillaume Bonnaud


 

Extrait

Quand il lui fallut pratiquer l’autopsie, le médecin légiste désigné par le juge d’instruction avoua n’avoir « jamais vu ça ». Raphaël était si décharné que le praticien confia avoir pensé, devant cet enfant de 19 mois qui venait de mourir, aux corps retrouvés lors de la libération des camps de concentration nazis. Nous étions alors en 1997, dans le hameau de Sus, à 45 km à l’ouest de Pau. Jugés devant la cour d’assises des Pyrénées-Atlantiques, ses parents, Michel et Dagmar, membres de la secte Tabitha’s Place, furent condamnés en appel à douze années de prison pour avoir laissé leur enfant, victime d’une grave malformation cardiaque, mourir sans recevoir de soins.

Une badine en osier de 40 cm
C’est ici que le drame s’est déroulé. Dans ce hameau devenu depuis une quarantaine d’années le fief français de cette organisation d’inspiration chrétienne protestante, née aux États-Unis et installée dans une douzaine de pays européens, connue sous les noms d’Ordre apostolique, Douze tribus ou Ruben and Brothers. Ici, pas de gourou en particulier. Mais un conseil composé de membres âgés qui décide des grandes orientations du groupe…