Un exode en culottes courtes

Alexandre Duyck

Denise, Michel ou Jean-Claude avaient entre 3 et 9 ans en mai-juin 1940, quand ils ont dû fuir subitement les Ardennes avec leur famille. À vélo, en train, surtout à pied, sous les bombardements allemands, comme 8 millions de personnes. Quatre-vingt ans après, ils se souviennent de cet exode. La peur, la faim... Mais aussi leur insouciance d’enfant..


Magazine : Le Monde

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Photos : DR
Parution : 2020


Extrait

Jean-Claude Vion est devenu directeur de MJC et de centres sociaux, et président de la Ligue des droits de l’homme des Ardennes. « D’avoir vécu l’exode puis, plus tard, la guerre d’Algérie, j’ai compris certaines choses. Nous-mêmes, Ardennais, avons été des réfugiés, des migrants, au sein de notre propre pays. Les gens ne quittent pas leur maison pour le plaisir mais pour fuir les horreurs de la guerre, la faim, la violence, il y a quatre-vingts ans comme aujourd’hui, et le devoir de solidarité perdure. La seule différence entre nous et les réfugiés d’aujourd’hui, c’est qu’eux doivent vivre sans l’espoir du retour. »
Gérard Moiny se souvient des étangs et des rivières regorgeant de goujons et de grenouilles. Les Ardennais découvrent une terre où on mange peu de pommes de terre, mais où l’on vénère un légume inconnu chez eux, un haricot blanc dont tous ces exilés de 1940 parlent aujourd’hui encore : les mogettes vendéennes. Les matchs de foot sont souvent remportés par ceux qu’on appelle parfois avec mépris « les Boches de l’Est ».